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De la plante au paysage : méthodes d’études de la végétation

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De la plante au paysage : méthodes d’études de la végétation

Conférence

 

Phytosociologie
 Qu’est-ce qu’un paysage si ce n’est – le plus souvent – que la juxtaposition de plantes entre elles. Mais ces rassemblements de plantes ne sont pas le fait du hasard. Ils illustrent des faits climatiques, écologiques et bien sûr humains.

Des méthodes de plus en plus précises vont conduire à distinguer chez les plantes des modes de vie puis des répartitions propres à chaque espèce, et enfin à mettre en évidence une sociologie des plantes. De ce dernier aspect peuvent découler diverses applications

 

Mercredi 7 mai 2025  17h     2023ème séance

Présidence Martine Gachignard   –  35  participants

 

Da la plante au paysage : méthodes d’études de la végétation

animée  par Michel Botineau SBF

Qu’est-ce qu’un paysage si ce n’est – le plus souvent – que la juxtaposition de plantes entre elles. Mais ces rassemblements ne sont pas le fait du hasard : ils illustrent des faits climatiques, écologiques et bien sûr humains. Mais comment appréhender cette mosaïque ?

Le premier moyen est l’étude de la Flore d’un territoire donné. On dresse la liste des espèces présentes, à l’origine de Catalogues et – si on ajoute des diagnoses – de Flores. Mais nous n’avons ici que la notion de présence / absence des plantes. Plus instructif est de s’interroger sur l’origine des plantes observées. Si certaines espèces sont réparties sur l’ensemble de notre territoire (Troène), d’autres sont plus localisées avec par exemple des répartitions atlantique (Jacinthe des bois), méditerranéenne (Chêne vert), montagnarde (Gentiane jaune) ou strictement endémique (Œillet de France ou Œillet des dunes) ; à côté de toutes ces plantes indigènes, se rencontrent des plantes adventices non introduites intentionnellement (Véronique de Perse) et des plantes naturalisées volontairement (Robinier) qui deviennent parfois invasives (Ambroisie). La représentation des pourcentages de chacun de ces groupes de plantes permet de caractériser la région étudiée.

Mais on peut être beaucoup plus précis par l’étude de la Végétation, c’est-à-dire des ensembles de plantes qui s’organisent pour former ces mosaïques paysagères.

  • 1ère– Les plantes peuvent être classées selon leur mode de vie hivernal. On distingue ainsi : les espèces visibles toute l’année, soit de grande taille avec les phanérophytes (arbres et arbustes dont les populations définissent les forêts), soit de taille plus modeste avec les chaméphytes (certaines constituent les landes) ; les espèces à moitié caché l’hiver, leur bourgeon se situant à ras du sol, avec les hémicryptophytes (se rassemblant pour former pelouses et prairies) ; les espèces non visibles l’hiver ou cryptophytes car leur bourgeon est caché, soit dans le sol (géophytes à bulbe ou à rhizome), soit dans la vase (hélophytes), soit dans l’eau (hydrophytes) ; enfin les thérophytes disparaissent totalement l’hiver et ne subsistent qu’à l’état de graines (ayant besoin de lumière pour germer, elles se localisent surtout dans les ouvertures des pelouses ou dans les cultures sarclées annuellement).
  • 2ème– Les plantes sont contraintes de s’adapter aux facteurs externes : climatiques, édaphiques et biotiques.

La prééminence des facteurs climatiques explique que, quels que soient les sols et les facteurs biotiques, les climats imposent de vastes bandes de végétation de même type plus ou moins parallèles à l’Équateur. De même dans les montagnes s’établit une zonation en fonction de l’altitude.

  • 3ème– La végétation n’est pas figée, elle évolue dans le temps, passant progressivement d’un milieu ouvert à une pelouse de plus en plus fermée, qui sera colonisée par des arbustes, et finalement aboutit à une forêt.

On a pu ainsi établir différentes séries de végétation selon le climat et la nature du sol. La représentation de ces séries permet d’obtenir des cartes de végétation, obtenues à l’aide des trois couleurs fondamentales et leurs mélanges entre elles.

  • 4ème– Les plantes présentant les mêmes exigences écologiques s’assemblent entre elles pour constituer des associations végétales qui sont des entités de composition floristique déterminée, présentant une physionomie uniforme, croissant dans des conditions également uniformes.

D’un côté ont été circonscrits des groupes écologiques en lien avec le sol : à chaque espèce est associé un diagramme écologique, la situant en fonction des gradients trophique (acide / calcaire) et hydrique (sec / humide).

D’un autre côté a été définie l’association végétale, caractérisée par des espèces qui lui sont fidèles. La Phytosociologie a pour but de mettre en évidence ces groupes d’espèces qui se développent ensemble. La méthode consiste à réaliser sur une surface déterminée un relevé de végétation : mais plus qu’une simple liste, c’est une véritable photographie que l’on réalise en attribuant à chaque espèce des coefficients, illustrant leur abondance relative, voire leur répartition au sein de cette surface. Des relevés similaires sont ensuite rassemblés dans un tableau, qui, par rapprochements des colonnes et des lignes, permet de définir une association végétale. Comme en Systématique, il existe en Phytosociologie une classification hiérarchique : l’association est l’unité de base caractérisant des conditions écologiques ponctuelles ; des associations proches sont rassemblées au sein d’alliances associées à des faits écologiques majeurs (humide / sec) ; des alliances proches sont rassemblées au sein d’ordres correspondant à des faits géographiques majeurs (atlantique / continental) ; enfin des ordres proches constituent des classes qui illustrent des faits structuraux (forêt, lande, pelouse, etc.). Comme en Systématique, la nomenclature est latine, partant du radical du nom de genre de la plante, et spécifique de chaque niveau hiérarchique : en ajoute le suffixe « – etum » pour l’association, « – ion » pour l’alliance, « – etalia » pour l’ordre, « – etea » pour la classe. Par exemple, les végétations nitrophiles des décombres et voisinages d’habitations sont rassemblées dans la classe des Galio aparines – Urticetea dioicae, au sein de laquelle les communautés des sols secs correspondent à l’ordre des Galio aparines – Alliarietalia ; les groupements des lieux plus ou moins ombragés définissent l’alliance du Geo  urbani – Alliarion qui rassemble plusieurs associations.

 

À quoi sert la Phytosociologie ?

Les applications sont multiples.

1.- Notion d’Habitats : le réseau « Natura 2000″ et la directive européenne « Habitats » se basent sur les associations végétales pour définir les sites d’intérêt communautaire.

2.- Phytosociologie et Milieu : les associations végétales peuvent illustrer des facteurs climatiques (Chênaie verte liée à une pluviométrie ˂ 700 mm), topographiques (pentes ombragées à fougères), édaphiques ; la répartition d’une association végétale est plus stricte que celle de chaque espèce végétale prise individuellement.

3.- Phytosociologie et Facteurs biotiques :

– Amplitude écologique : la phytosociologie permet de corréler ou non une espèce à une association ; inversement, la présence d’une même espèce dans des groupements bien différents peut conduire à réfléchir sur le contour même de l’espèce végétale.

– Dynamique des populations : le tableau phytosociologique permet de mettre en évidence les stades initiaux et d’évolution ; ainsi dans une lande avec les vestiges de pelouse et le début de boisement.

4.- Phytosociologie et activités humaines :

– Pratiques agricoles : une prairie de fauche et une prairie pâturée vont présenter des flores différentes ; il est possible également de déceler les prémices d’une déprise ou à l’inverse d’un surpâturage.

– Bio-indication : par exemple, l’eutrophisation d’une rivière peut être mise en évidence par l’apparition d’espèces inhabituelles dans l’association végétale caractéristique de cette rivière.

– Archéologie : certaines espèces végétales sont associées à des vestiges archéologiques. Ainsi la présence de  Buis en terrain acide est associée à une occupation gallo-romaine ; l’abondance d’une flore nitrophile caractérise les ruines médiévales… Certaines plantes sont des « anomalies botaniques » : la Petite Pervenche, originaire d’Europe centrale, ne fructifie pas chez nous et sa présence ne peut donc être consécutive qu’à une introduction humaine.

5.- Analyse paysagère : de la plante au paysage, il n’y a donc qu’un pas. L’analyse paysagère suit les mêmes méthodes, mais ici on effectue un relevé d’associations végétales sur de vastes superficies.

 

  mosaïque de formations végétales

Conclusion.-

En côtoyant les plantes, peut-être les regarderons-nous désormais de manière différente ?

Communiqué du conférencier

Nos remerciements les plus chaleureux, à Michel Botineau, pour une présentation didactique, richement illustrée… Ayons un autre regard…